Se lancer en voilier-stop

Pour compléter le super site Tourdumondiste.com à propos du voilier-stop, j’offre mon point de vue de jeune femme équipière cyclovoyageuse qui embarqua d’abord en couple puis en solitaire à bord de voilier principalement masculin.


Sites utiles

Les méthodes qui ont fonctionné pour moi :

  • crewbay.com (Transpac partie 2) – 2 semaines de recherche
  • findacrew.com (Transpac partie 1) – 3 mois de recherche
  • bouche à oreille sur la marina et les alentours (Trans-caraïbe) – 1 mois de recherche
  • motive ton colloque à acheter son voilier et réaliser son rêve (Transatlantique) – un coup de fil

Parmi ces sites et groupes Facebook (que je n’ai pas tous utilisé à l’époque) je postais mon annonce au moins une fois par semaine. On fini par se faire connaitre sur les groupes Facebook mais pas que, ça sort vite des réseaux par les soirées entre marins au ports. Vous serez connu au bataillon et si quelqu’un cherche un.e équipière, vous serez peut être mentionnée.

Spécialement pour les navigatrices

Toutes zones géographiques:

Pour l’Australie vers Asie:

Pour La Trans-Pacifique :

Caraïbe vers Amérique :

Pour la Trans-atlantique :

Site à surveiller chaque semaine:

sites payants :


Les 10 commandements

  1. Être flexible sur la destination. Les plans peuvent être amenés à changer pour de nombreuses raisons. Le voyage est fait de surprises. Visez une zone géographique large, Amérique centrale, Antilles, plutôt qu’un pays en particulier.
  2.  Connaitre les périodes favorables pour traverser un océan et donc chercher suffisamment tôt son voilier et au bon endroit.
    La transatlantique en direction des Antilles commence en novembre, vous pouvez déjà chercher à partir d’octobre. Les routes classiques partent des côtes françaises atlantique ou méditerranée mais également depuis le Portugal, l’Espagne, Madère, les Iles Canaries.  Sur ces dernières étapes du sud vous pouvez embarquer sur un voilier jusqu’à la fin février, maximum mi-mars. Attention, il y en aura beaucoup moins que tôt dans la saison et donc souvent les équipages sont déjà constitués.
    La Transpacifique d’Asie vers l’Amérique ne se fait que très rarement. Les routes classiques sont d’Est en Ouest.

    Des cartes bien utiles sont disponibles sur le site tourdumondiste.com

3. Multiplier les annonces

A distance :

Utiliser votre réseau amical, familiale (certains ne s’en doute pas mais on des amis d’amis marins), plateformes en ligne (type crewbay, bourses aux équipiers), pages facebook des marinas, groupes facebook de voiliers, de régate, de traversée. Je fais référence à tous les sites utiles précédemment dans l’article.

Sur place :

  • Déposer votre annonce papier datée, parfois estampillée par la capitainerie, sur papier imperméable (RiteInTheRain) ou sous plastique (chercher dans poubelle). J’explique les points clefs d’une annonce courte et efficace dans la suite de l’article
  • Lieux d’affichage : tableau officiel marina, affichages publics, toilettes, douches, sous plastique au ponton annexe, dans les cybercafé/bar, voileries, bureau de plongée, magasin de pêche et d’accastillages, station essence, boulangerie, café et bar, ateliers marines, supermarché, zone à poubelle de la marina, soit tous les coins du voileux.
  • Emprunter un kayak ou une annexe à quelqu’un de sympa pour démarcher les voiliers aux mouillages,Attendre les équipages au pontons annexes pour cibler les voiliers aux mouillages  
  • Parlez-en autour de vous. Travailler localement ou donner un coup de main dans la marina. L’idée étant de communiquer un maximum autour de votre projet. Il y aura des dizaines de refus, parfois sympa, parfois moins, mais la persévérance (et la patience) paye toujours !
  • Faire la tournée des marinas directement sur les pontons aux heures de présences des équipages : typiquement le matin ou le milieu jusqu’à la fin-d’après midi avant l’apéro. Eviter après 20h, tout le monde a besoin de tranquilité, et ça boit pas mal sur les pontons, c’est préférable d’obtenir une conversation relativement sobre. Je décris ma stratégie dans la suite de l’article.
  • Dans votre démarche ne pas avancer l’aspect écologique de la voile pour racoler un maximum de capitaines. Vous risquerez sûrement de faire l’opposé. La construction, la maintenance, les rejets de biocides ou bien l’entretien du moteur sont polluants. Certes, en naviguant sur les voiliers à plusieurs vous divisez l’impact carbone, mais ce n’est jamais zéro.

4. Toujours passer du temps suffisant avec l’équipage.

Une soirée ou une réunion sur skype ne suffisent pas ! Le mieux étant de vivre ensemble sur le bateau. Quelques jours de navigation proche des côtes sont souvent très révélateurs de la compétence ou non du capitaine et de l’ambiance à bord. À cette occasion vérifiez la présence d’éléments de sécurité comme la survie sur le pont, gilets de sauvetages valides, lignes de vie et globalement l’état général du navire. Demander et vérifier qu’il n’existe pas d’arme à bord. Une checklist est disponible dans la suite de l’article.

5. Être prête à modifier sa zone de confort.

Naviguer peut vous offrir le meilleur comme le pire. Manque de sommeil, promiscuité, mouvements et bruits permanents, désorganisation du bateau, peu de douche, peuvent transformer le plus beau rêve en pire cauchemar pour celui ou celle qui n’est pas préparé à vivre éloigné de sa zone de confort. Sa zone de confort est une chose, mais celle des autres est encore bien différentes. La liberté s’arrête où commence celle des autres. C’est parfaitement valable pour la zone de confort en mer. Les autres n’ont pas les mêmes capacités adaptations que vous. Il est important de savoir bichonner son co-équipier dans les moments où il est en difficulté sans pour autant se faire marcher dessus. Pour aider, on peut parfois adapter les quarts de nuits pour une personne vraiment en difficulté, on peut rallonger d’une heure son quart, préparer à manger à l’avance pour le suivant pour son quart.

6. Soigner les relations sociales à bord.

Le point le plus critique ! Rester relativement souple avec le capitaine et l’équipage permet souvent d’éviter la crise diplomatique. Même si un des traits de caractère d’un coéquipier vous agace sévèrement, le milieu d’un océan n’est pas le meilleur endroit pour régler vos différents. Discuter avant un conflit et mettre les choses à plat plusieurs fois s’il le faut.
Avoir conscience que nous ne sommes pas indispensables à bord. Bon nombre de skippers n’ont pas besoin d’équipier pour manœuvrer, mais considèrent qu’une traversée est plus confortable avec un bon équipage. Tous les bateaux-stoppeurs.ses vous diront, que c’est le facteur humain qui est le plus dur à gérer. En comparaison, le routage, la météo, la mer et le voilier, sont de la rigolade.

7. Objectifs clairs des deux côtés en terme de rythme de voyage.

En terme d’escales, de mouillages vs marinas, les dépenses sont autant de sujet à aborder avant le départ. Concernant la nourriture il est indispensable d’être clair sur les quantités nécessaires. Manger à sa faim est fondamental pour naviguer dans de bonnes conditions, Olivier Peyre vous en dira plus sur le sujet sur son site enrouteavecaile.com.

8. Avoir plusieurs options pour gérer les désistements

9. Quid de l’expérience en mer?

Pas du tout indispensable à mes yeux. Mais, il est très important de savoir si la voile vous plaît et en combien de temps votre (potentiel) mal de mer disparaît (souvent en 48h).
Le top du top étant d’aller naviguer quelques demi-journées avant de se lancer dans une longue traversée. Les clubs nautiques ou la plateforme bourses aux équipiers sont bien adaptées à cette démarche.

10. Ne pas se surévaluer.

Que ce soit socialement, au niveau de ses compétences à bord, ou sur sa capacité d’adaptation, il me semble indispensable d’être honnête avec soi-même et les autres. Personne n’est irremplaçable.


La tournée des marinas

Pas facile pour certaine de se lancer à l’abordage de ces voiliers inconnus, qui n’ont rien demandé et qui voient se pointer un.e inconnu.e, la fleur au fusil, pour voyager avec eux. Oui, c’est normal d’être un peu gêné.

Avant de me lancer, j’avais l’inconfort d’imaginer déranger les équipages, ne pas être prise au sérieux ou être traitée de bougre de faux jetons à la sauce tartare, façon capitaine Haddock. De surcroit, en tant que femme, l’appréhension est d’autant plus forte. On a peur d’être prise pour cible du samedi soir, débutante naïve à emballer sur le pont, pour l’idiote de service qui ne sait pas son tribord de son bâbord, ou la pin-up qui cherche un embarquement pour se faire bronzer avec des doigts de pieds en éventail sous la grand-voile. Tous les stéréotypes du milieu terrien additionnés au milieu marin, ça pèse dans le milieu !

Etape 0 | La base
J’espère que vous êtes à la bonne saison au bon endroit, que vous avez quelques semaines devant vous, un hébergement pas trop loin des marinas et que vous êtes armé de patience et de positivisme !

Etape 1 | Observer et se préparer

Il y a de nombreux éléments stratégiques à observer. Il est possible de venir à la marina une première fois, pour repérer les lieux avant même de se lancer à l’abordage. Il faut trouver les zones où les bateaux sont actifs, ceux en préparation, éviter ceux en hivernages, noter les créneaux de fréquentations et surtout trouver accès au ponton. Programmer vos passages dans la semaine à différents moments de la journée pour rencontrer le maximum de personnes : les retraités qui prennent l’apéro à bord, les voileux qui bossent toutes la journée la tête dans le moteur, les locaux qui souvent bossent à terre qui partent tôt en ville et reviennent en soirée, les familles, les bandes de copains qui sortent en soirée et se lève tard à bord. Bref, les marinas brassent du monde, soyez flexible.

S’habiller correctement et en mode sportif, un carnet de notes, un crayon, votre portable chargé, votre speech en tête et roule ma poule. Être armé d’autodérision, de patience et de bonne volonté cela aide aussi.

Etape 2 | Accès au ponton
L’accès à la marina est en général ouvert, mais l’arrivée proprement dite aux voiliers par les pontons, quant à elle, reste surveillée dans les pays « développés ». Souvent libre dans la journée, fermée la nuit, et parfois totalement fermée (Panama, Mexique, Polynésie Papeete).

Si l’entrée à la mariné est interdite, il y a toujours une solution !

Plan (a) HaAAAllelujah –  (Oui, ça marche même avec le H) Demandez à la capitainerie un accès sur certaines heures en laissant votre passeport.

Plan (b) Changer de Bougre – S’ils refusent, essayez le lendemain avec un autre membre de la capitainerie, parfois, c’est juste la personne qui bloque.

Plan (c) Copiner – rester dans le coin de la sortie de la marina et discuter avec les usagers qui en sortent. Expliquez votre situation. Il y en a forcément un ou une, qui est aussi passé par là, et décidera de vous prêter son pass d’accès, sa clef ou son code pendant quelques heures. Proposez toujours une pièce d’identité pour instaurer confiance.

Plan (d) « Démarcher » allez dans les zones extérieures aux pontons : atelier de réparation de bateau, sanitaire, espace de co-working, espace climatisé, bar pour demander un pass. Essayer plusieurs jours de suite s’il faut.

Plan (e) « Enfilade » Profiter de la sortie de quelqu’un pour lui tenir la porte, le saluer genre « t’es de la marina » et naturellement rentrer. Oui ça marche bien !

Plan (f) « Forcer le passage », et enjamber discrètement le portail. Dans des cas extrêmes, j’ai enjambé rapidos et sans que personne ne regarde, suivant la hauteur du portail c’était plus ou moins spectaculaire, parfois plus facile à marée haute ou à marée basse (observer, étape cruciale). Si quelqu’un vous interrompt, deux options (suivant si c’est le vigile ou l’ouvrier qui travaille). Expliquez la situation réelle ou prétexter que l’autre équiper André à la clef et pas vous… blabla et filez vite. (C’est qui André, je sais pas).

Plan (g) « G toujours pas la clef ».   Hélez un voilier depuis l’entrée en lui demandant de vous ouvrir.

Etape 3 | Stratégie du présentiel
Je vise toujours en premier les voiliers où je vois quelqu’un à bord. Je fais confiance au facteur humain, dans les discussions on progresse toujours plus rapidement qu’aléatoirement.

Etape 4 | Aborder le voilier
Avec une voie qui porte lancer un grand bonjour, toquer à la coque si personne n’est là, ne pas insister mais repasser le lendemain à un créneau différents. Notez le nom du bateau pas encore visité et le numéro du quai.

Etape 5 | Briser la glace
C’est à vous ! Faire simple, franc et court, typiquement « Bonjour, je suis équipière, je cherche à partir vers l’Amérique centrale, vous ne partiriez pas dans cette région-là prochainement ? » Facile, n’est-ce-pas.

Vous recevez un NON : demandez s’ils connaissent des voiliers qui partent dans cette direction. Profitez-en pour demander les noms des groupes Facebook locaux, des régates du coin, puis laisser un petit mot papier avec votre numéro, votre email, votre nom et votre destination, votre projet, au cas où ils rencontrent quelqu’un qui est besoin d’une équipière.

Vous recevez un OUI on part dans cette direction : C’est votre quart d’heure commercial, annoncez la couleur : expériences, sur quel type de voilier vous avez navigué, les distances, vos disponibilités, le peu de bagage, vos compétences voiliers et détail de votre projet. Laisser s’engager la discussion puis poser vos questions progressivement. Très important : échangez les numéros et adresse e-mail et surtout proposer de les revoir en présence du capitaine pour découvrir son voilier, proposer de donner un coup de main le lendemain s’ils ont besoin d’aide. Bien sûr, ne jamais monter à bord sans l’autorisation, rester en dehors du voilier pendant la discussion. Si on vous invite : toujours enlever ses chaussures avant de monter.

Etape 6 | Fin de la tournée du jour : La première tournée est terminée, si vous n’avez pas de réponse positive, c’est normal. Personnellement, cela n’a jamais marché à ma première tournée en marina. C’est le moment de faire le bilan en rentrant chez soi de quel bateau n’a pas encore été contacté, et bien sûr vérifier les nouvelles annonces sur tous les sites internets etc… et demain vous remettez ça, à un créneau différent de la journée pour toucher d’autres navigateurs et navigatrices.

Mektoub, bon vent !

Pour aller plus loin Tourdumondiste.com
Le livre: World cruising routes de Jimmy Cornell.
École de voile: Les glénans

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